Il se peut qu’une des plus effrayantes conséquences de la prise de drogue est de se retrouver complètement seul.
Bien sûr c’est effrayant quand tes veines gonflent et des trous s’y forment. C’est terrible quand ta peau s’épluche et forme des plaies, quand des ulcères se forment sur ton corps, quand tu commences à pourrir de l’intérieur.
Pourtant c’est encore plus effrayant de comprendre un jour que tu veux stopper cela, arrêter la drogue, mais tout le monde te tourne le dos. Et tu te poses la question « puis-je arriver tout seul à abandonner la drogue? », et tu comprends que cela demandera une force surhumaine et tout seul tu n’y arriveras pas : la cure, la réhabilitation, le rétablissement… Mais personne pour t’aider. Tu te retrouves tout seul. Tes parents fatigués de leur combat te tournent le dos – combien de fois ils t’ont supplié pour que tu arrêtes ; tes amis sont partis aussi, ils ont d’autres préoccupations : faire leurs études, aller travailler, donner vie à des enfants en bonne santé. Et même la société ne t’accepte pas car elle est très hostile aux gens comme toi:
«Les personnes droguées et alcooliques sont des parasites et des maladies de notre société. Comme le rhume ou la toux, il faut les traiter ces maladies-là. Peu importe comment. Selon moi toutes les méthodes sont bonnes, jusqu’ à la liquidation (comme pour un cancer)»
«Mon oncle est un drogué. Il faut tuer ces bêtes du premier coup.. Sinon il vendront tous leurs proches à la première occasion».
«Fusiller? Il faut les bruler vifs. Ce ne sont pas des humains, ce ne sont même pas des bêtes. Ce sont des dégénérés (certes, il n’y a pas d’autres mots).»
C’est ton châtiment pour la consommation des drogues. Tu t’en rends compte et cela te torture. Cela te fait plus mal qu’un nouvel ulcère, plus mal qu’une nouvelle maladie, plus mal que te fait ton cerveau quand il subit une «overdose».
La seule chose qu’il te reste à faire c’est augmenter la dose, aller jusqu’à «la fin» et disparaître, en oubliant que tu aurais pu ne jamais commencer. Tout cela parce que tu n’as peut être pas entendu la voix qui disait:
«Nous sommes tous des humains. Nous avons tous le droit de faire des erreurs. Soyez des humains et pas des monstres». Cette voix aurait pu te donner la main et te sortir de ton trou.
Mais il est trop tard. Et pour la toute dernière fois le manque te domine et tu oublies que toi aussi, tu es un être humain… Tu l’étais auparavant. Et tu pourrais continuer à l’être. Mais pourquoi la conscience de cette évidence vient seulement quand tu te sens tout seul dans la foule?
