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Derrière les barreaux

09.11.2012       12:12       59 ͤ jour       Lyudmila

L’enquête a duré presque un an. Pendant tout ce temps-là je me préparais moralement à la prison. Je savais pertinemment que j’y serais condamnée, car l’examen médical a émis la conclusion que j’avais besoin d’un traitement forcé. Mon mari m’expliquait quels étaient les usages là-bas, comment il fallait se comporter etc. Les prisons de femmes et d’hommes sont très différentes, mais je ne connaissais aucune femme qui aurait fait de la prison.

Bien sûr je m’inquiétais et j’avais très peur de la taule. Maman et la famille ont appris seulement la veille que j’aurais un procès. Maman étais choquée. Elle n’arrivait pas à croire que sa fille sera jugée. Elle a su que le jour même que je prenais de la drogue. Elle insistait que je dise la vérité, mais je ne pouvais pas. Bien sûr, les complices n’était pas au tribunal. Mon mari n’était pas loin, dehors à côté du tribunal. Le juge m’a donné un an d’emprisonnement. Il a dit que c’était pour que la prochaine fois je choisisse mieux mes relations. Lui aussi, il croyait à peine que c’était ma drogue, la biographie de mes complices était trop garnie.

Et alors, dans la salle du tribunal j’étais prise sous garde. J’ai passé la nuit dans l’isolateur de la brigade de police. On ne m’a pas renfermé dans la cellule, j’étais assise dans le couloir. Je pleurais de la peur et aussi parce qu’on ne pouvait plus rien changer. J’avais enfin réalisé que je suis derrière les barreaux pour longtemps. J’avais l’impression qu’un an c’est tellement long…
A la brigade j’ai rencontré un toxicomane d’une quarantaine-cinquantaine d’années. Il me semblait être un viellard. Il m’a dit: «Regarde-moi, dans 15-20 ans tu seras encore pire que moi. Et tu n’as qu’une fin possible: soit tu meurs dans la rue, soit d’un coup de couteau». Il a dit que je devais m’arrêter avant que ce soit trop tard. Cela m’a indignée et insulté jusqu’au plus profond de moi. Que moi, je devienne comme lui, jamais. Et ces paroles de prophète sont passées à côté de moi. Oh, si seulement je les avais entendues à ce moment-là…

Le matin on m’a emmené en prison et les portes vers la liberté se sont renfermées derrière moi. La prison m’a accueillie par une puanteur terrible, l’odeur de tabac, de pourriture, de sueur et encore quelque chose de dégoutant. Je n’avais encore jamais rencontré cette odeur ailleurs qu’en prison, elle est la même dans toutes les prisons. Et les gens qui s’y trouvent ont la même odeur aussi. Après on s’y habitue. Mais les premiers temps, c’est une horreur. Je marchais tendue comme un ressort bien que je paraissais calme malgré le déshabillage humiliant devant tout le monde pendant les fouilles.

Dans la cellule j’ai rencontré une toxicomane de notre ville. Elle avait déjà de l’expérience, c’était sa 3me condamnation. Dès les premières phrases nous avons trouvé les connaissances communes, et une demi-heure après on fumait un joint ensemble. C’est une petite prison à Prjevalsk, il n’y a qu’une cellule de femmes. Il s’y trouvait des personnes très différentes, il y en avait qui était là par hasard. Ceux qui purgeaient des peines pour  des crimes économiques étaient très lointains du monde criminel, «des voleurs de beurre», et certains n’ont pas aimé qu’on fumait. Je savais qu’il ne fallait pas se laisser faire dès la première fois, et  j’ai commencé une bagarre. Il y a eu une grosse pagaille et dès le premier jour j’étais au cachot pour 5 jours.

Quelque temps après j’ai compris qu’on pouvait vivre en prison, seulement il fallait moins parler et surveiller ses actes. Pour se distraire un peu les filles écrivent des petits mots pour envoyer dans des cellules d’hommes. Des histoires d’amour naissent. L’ambiance aide, et avec de l’amour c’est plus facile de vivre, en plus on se soutient avec des vêtements, de la nourriture, des cigarettes. Avant le procès on a droit qu’à un colis par mois, 5 kilo. Mais on fait passer de tout d’une cellule à l’autre, jusqu’à la drogue, par des policiers ou des prisonniers qui sont restés travailler en prison après le procès. On les appelle aussi des «bandits économiques». C’est une caste la plus basse, on ne les respecte pas, mais il est impossible de se passer d’eux dans une prison. Une personne humaine peut survivre partout, même si les barreaux pèsent terriblement.

 

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Commentaires:

  • Antouanette, 10.11.12, 04:56

    Il y a peu de gens qui puissent revenir à la vie normale après la prison.

  • Jochua, 09.11.12, 19:51

    Ils vous a donné seulement un an, vous l’échappé belle.

  • Jules, 09.11.12, 12:32

    Il est dommage, qu’à ce temps-là vous n'avez pas compris les paroles du vieillard.