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Purification

27.10.2012       10:37       46 ͤ jour       Lyudmila

Avant d’aller à l’hôpital, je suis tombée par hasard sur une brochure «Le chemin vers Dieu». Elle parlait d’un homme qui étant fatigué de vivre dans la débauche, la saleté et les péchés a prié Dieu: «Comment trouver le chemin qui mène vers toi? Donne-moi un signe!» Il allait dans les églises, changeait des confessions, mais rien ne changeait dans sa vie, tout restait comme avant. Il a rencontré un voyageur, l’a demandé que devait-il faire pour changer. Le voyageur a répondu: «Demande pardon, repenti-toi de tes péchés». Il a passé beaucoup de temps à regretter ce qu’il a fait, il s’est souvenu de tous ses anciens péchés, mais la vie ne changeait pas pour autant, seulement la charge des péchés pesait de plus en plus lourd, et l’homme était complètement désespéré. Un jour il a rencontré un autre voyageur qui lui a dit: «Dieu a envoyé son fils à un supplice terrible pour que tu sois pardonné pour le passé, le présent et le futur. Accepte simplement ce pardon de tout ton cœur».

Avant j’avais déjà entendu des paroles semblables, mais là  j’ai eu un déclic. C’est vrai ! Je suis pardonnée! Ce jour-là j’étais hospitalisée, et dès que j’ai pu, j’ai pris la Bible et j’ai commencé à lire à partir de la première page. Cela fait une semaine qu’il se passe quelque chose en moi. Mon âme est dégelée. Jusqu’à là toujours réservée et maussade, j’ai tout d’un coup commencé à sourire, même rire à cause d’un rien. Ca n’est pas arrivé depuis des années. J’ai commencé à parler aux gens dans ma chambre d’hôpital, chose que je ne m’avait jamais autorisé avant. C’est un état très agréable…

C’est dommage que mon chemin vers Dieu ait été si long.

En 2005 la police,  en me battant et en employant la force contre mon fils, qui avait 12 ans à l’époque, me fait écrire une déposition qu’on a trouvé chez moi 5 grammes d’héroïne. Pour la première fois de ma vie je me suis sentie aussi humiliée, alors que j’avais déjà touché le fond. Ils me réclamaient 500 dollars ce qui était équivalent pour moi à 5 millions – un montant aussi inimaginable. On est partis de la maison et pendant 4 mois on se cachait là où on trouvait : dans des greniers, dans des caves, dans des asiles de nuit, si on trouvait de l’argent. Il n’y avait plus où aller. Les policiers venaient tout le temps chez moi, ils ont cassé toutes les portes et les fenêtres, croyant que je me cache à l’intérieur.

L’automne est arrivé. On ne pouvait plus passer la nuit dehors. Je ne parle même pas de se laver et de se changer. Alors en décembre, sans demander l’autorisation, j’ai laissé mon fils chez la famille qui m’avait rejetée depuis longtemps et ne me parlait plus, et je suis partie dans la rue.

Le froid. La neige. Aucun endroit où dormir et pas de vêtements chaud. Seule la vodka me réchauffait et je continuais à avancer au radar. Les anciennes connaissances ne me reconnaissaient plus. Moi, je les évitais. J’allais voir mon fils tous les jours, mais quelle utilité de mes visites? Je ne faisais que de lui faire mal. Cinque fois l’ambulance m’avait emmené, mais au bout de 3-4 jours on me faisait partir, et je retournais dans la rue. Alors j’ai prié Dieu de me donner la mort. J’y voyais la seule solution possible.

Mais un jour, au printemps, mon fils est venu tout en larmes. Il a dit qu’on le chassait, que la tante l’engueulait tous les jours, le faisait faire tout le travail à la maison, criaut qu’il fallait que sa mère récupère son parasite. Évidemment, il n’allait pas à l’école.

Jusqu’à ce jour je pensais qu’il irait mieux quand je ne serais plus là. Je l’ai calmé avec des promesses, il est parti, et moi je me suis effondrée. À ce moment-là j’étais habituée à l’absence des émotions et le vide dans l’âme, mais là je suis allée à un chantier deserte, et je sanglotais pendant 4 heures. Je pensais, que resterait-il à Édik? Un orphelinat? La répétition de mon destin? C’était la plus grande peur de ma vie.

Ce jour-là quelque chose s’est retournée dans mon âme. C’est comme si je m’étais réveillée et commencé à me battre pour vivre. Épuisée physiquement je tenais à peine debout. J’étais absolument dystrophique, je pesais 37 kg. À cette période en me regardant, on ne me donnait même pas 10% de chances que je survivrais. Les premiers hôpitaux pour les malades de SIDA ont apparus alors à Bichkek, j’y venais, je m’asseyais sur le pas de la porte et je ne partais pas: faites de moi ce que vous voulez. Ils me chassaient en me disant que j’étais soule, malgré que je n’aie pas bu une goutte d’alcool depuis. J’allais voir les gens que je connaissais et je les embêtais pour qu’ils me donnent de l’argent pour manger et reprendre des forces, je faisais la manche. Mon fils, brave garçon, faisait des petits boulots, balayait les bus, accompagnait le chauffeur comme receveur et m’apportait tous les jours une galette et une salade, m’aidait comme il pouvait. Par contre, il ne me donnait pas l’argent, il avait peur que je rechute, que je recommence à boire.

J’ai donné une interview à un journal pour parler de moi, j’étais la première à Kirghizstan à ouvrir un statut SIDA, et une organisation sociale qui travaillait dans ce domaine, m’a trouvée. Ils nous ont pris, moi et mon fils, dans un foyer social, m’ont fait hospitaliser deux fois, m’ont aidé à obtenir la reconnaissance d’invalidité pour que je puisse bénéficier ne serait-ce que d’une toute petite allocation alimentaire (700 som¹), ont complétement soigné ma pneumonie pneumocistique, m’ont remonté l’hémoglobine de 26 jusqu’à la normale, ont ralentis le développement de la cirrhose du foie, et encore beaucoup d’autres maladies sont restées derrière moi.

Nous sommes restés chez eux pendant un an et demi, après quoi je me suis enfin remise sur pieds. Ensuite tout dépendait de moi. J’avais devant moi un départ à zéro…

Vous savez, j’étais en train d’écrire ça, je n’ai pas pu me retenir, j’ai pleuré. Mais ce sont des larmes de purification et de gratitude à Dieu pour toutes ses épreuves.

 

1. Som est une devise nationale de Kirghizstan. 700 som équivalent à 15 dollars USA environ.

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Commentaires:

  • Alain, 29.10.12, 07:16

    Il ne faut pas penser de la mort, à votre fils il ne sera pas plus facile après votre mort, croyez-moi!

  • Sébastien, 28.10.12, 20:42

    Autant d'erreurs, autant de repentirs, conserves-nous le Dieu de tous les malheurs .

  • Anne, 27.10.12, 12:07

    C’est dommage que votre chemin vers Dieu a été si long.